Ce vendredi 1er avril 2016 s’ouvre l’exposition « Impression 3 D, L’usine du Futur » au Lieu du design 11 rue de Cambrai 75019 Paris. Pendant trois mois elle voudrait nous amener à réfléchir non seulement aux usages sociaux des imprimantes 3 D (dans l’architecture, les transports, la mode, la santé…) mais aussi aux mutations de nos modes de vie et notamment de nos façons de nous alimenter. Pendant ces trois mois, nous proposerons quelques focus sur ces changements, au fil d’exemples illustrant l’amplitude des possibles liés à ces technologies….
Quand on parle d’innovation culinaire, c’est avant tout de nouveaux aliments ou de nouvelles façons de les consommer. Pourtant les principales innovations à venir portent sans doute sur la conception et la fabrique de ces aliments. L’imprimante 3D n’était jusqu’il y a peu qu’un épatant gadget… Mais si les entreprises s’y intéressent de plus en plus c’est qu’avec elle c’est toute la chaine de valeur qui est remise en question. Comment et surtout pourquoi nos imprimantes 3D devraient (nous dit-on) nous aider à nous alimenter, à ne pas épuiser les ressources de la planète, à répondre aux pénuries de matières premières annoncées, à mieux nous nourrir où que l’on soit, quelque soit le climat et même l’atmosphère ?
Les laboratoires de la Nasa et du MIT ont ouvert voici quelques temps ce marché (naissant voire embryonnaire). Mais, sur le plan commercial, de plus en plus de start up, des groupes alimentaires mais aussi des constructeurs (le britannique ChocEdge par exemple) se lancent.
A l’instar de Barilla qui avait lancé en 2014 un concours de design de pâtes à imprimer 3 D et qui a développé une machine pour les professionnels, de Natural machines qui s’apprête à proposer au grand public une Foodini (une imprimante 3D de nourriture qui s’est déjà illustrée par la fabrication de pizzas)… auxquelles s’ajoutent la Candy, la Bocusini qui s’exposent dans différents salons alimentaires pour proposer notamment des pâtes alimentaires à base de chocolat de sirop ou de légumes….
Evoquons aussi la gamme d’imprimantes 3D alimentaires du géant 3D systems qui a inventé la Chefjet Pro et Cocojet (permettant d’imprimer des créations complexes en sucre ou en chocolat). La marque US est allée plus loin en ouvrant le 3 DS culinary Lab (en novembre dernier) à Los Angeles, un laboratoire dédié à la démocratisation de l’impression 3D en cuisine, lieu de l’innovation et lieu de culture. Ce laboratoire d’expérimentation (dédié donc à l’apprentissage 3D en cuisine) devrait permettre aux chefs, aux amateurs de gastronomie ou aux pionniers de la cuisine moderne de combiner leur savoir faire à l’usage de l’impression 3D alimentaire. En testant les dernières innovations développées par 3 D systems n’en deviennent-ils pas les ambassadeurs les plus influents?
Le laboratoire culinaire de 3D Systems aux Etats-Unis
Face à ces expérimentations, des initiatives françaises se structurent : ainsi récemment le Centre Culinaire Contemporain de Rennes (qui cherche notamment à décrypter les usages et les représentations culinaires) s’est associé à l’EESAB (Ecole Européenne Supérieure des Arts de Bretagne) et à BDI (Bretagne Développement Innovation) pour initier un programme de R&D collaboratif favorisant le croisement entre innovations digitales et filières alimentaires. De nombreux regards scientifiques seront convoqués (chimie des aliments, SHS, sciences de l’information et de la communication) et l’impression 3 D aura son laboratoire Food tech dédié. Ce projet collaboratif (qui se structure et devrait candidater au titre des programmes de financement public pour la période 2016-2019) sera ouvert aux acteurs de la chaîne alimentaire : déjà plusieurs industriels ont manifesté leur adhésion au dispositif….
Donc l’heure est à l’imprimante 3 D alimentaire : on nous prédit ainsi que demain nous imprimerons nos repas à base de cartouches… mais que penser des incidences de ces promesses et transformations annoncées dans la vie courante? La visite de l’exposition et nos commentaires à venir nous apporteront (peut-être) quelques réponses…
Dominique Pagès