Sur la planète du chocolat, la Suisse peut être vue comme une anomalie géographique. Les Suisses sont les plus gros mangeurs de chocolat au monde en sont aussi les producteurs les plus appréciés. Une anomalie qu’on a mise sur le compte d’une gourmandise bien placée ou d’une capacité innée à faire de la qualité dans cette « niche » gastronomique. Or, cette question d’histoire et de géographie culturelle mérite qu’on s’y attarde. Rien ne prédestinait la Suisse à exploiter toutes les capacités du chocolat à être l’une des friandises les plus prisées au monde.
La Suisse n’a pas d’empire colonial, donc pas de connexion directe avec les producteurs. La Suisse n’a pas connu de pouvoir politique avec une cour royale avide de plaisirs et de représentation. La Suisse, enfin, n’a pas de tradition pâtissière affirmée comme l’Espagne ou l’Autriche qui destinait au chocolat une place de choix dans les plaisirs de bouche. De cette énigme, Gilles Fumey trace l’histoire, la manière dont la Suisse s’est chocolatée au cours du XIXe siècle et comment, au tournant du XXe siècle, elle a opté pour une industrialisation du chocolat sans sacrifier à sa culture artisanale de luxe. Mais un luxe démocratique qui a permis d’assurer au chocolat suisse une saga mondiale qui n’est pas près de se terminer. Gilles Fumey plonge dans les racines culturelles de quelques villes pionnières, de quelques familles entreprenantes qui ont su prendre la mesure du parti qu’elles pouvaient tirer du chocolat. Les grands noms circulent dans ce livre. Leur histoire familiale devient peu à peu une histoire « nationale », celle de la Suisse qui adopte le chocolat comme l’un de ses marqueurs identitaires les plus forts.
Gilles Fumey est chercheur au CNRS, professeur à l’université Paris-Sorbonne et à Sciences Po.
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